LA CITE DE DIEU
Au milieu de ce gangstérisme barbare, subsiste Fusée, habitant de la favela, qui lui ne s'est jamais éloigné du droit chemin, ayant pour but de devenir un jour photographe. Et c'est à travers ce personnage que le réalisateur décide de nous faire suivre l'histoire. Avec une structure entièrement chamboulée, à la manière de Pulp Fiction ou Reservoir Dogs pour ne citer que ces deux films de Quentin Tarantino dont l'influence est notable, Fernando Mireilles fait de son film un authentique chapitrage des pires exactions de ces jeunes malfrats, la voix off de Fusée étant là pour revenir ou passer à un événement particulier ou pas. Cette narration éclatée où chaque scène se retrouve sans cesse reléguée les unes par rapport aux autres selon le cadre de l'action, traduit le désordre intérieur de la favela que l'Etat a délaissé depuis bien longtemps et désormais récupérée par Dieu (d'où le titre du film).
Et ce désordre va également se retrouver dans l'esthétique même du film à coups d'accélérés névrotiques pourchassant une balle de revolver avant de se loger dans la cible, d'arrêts brutaux sur image, et d'effets stroboscopiques. De fait le film de Mireilles s'éloigne du documentaire privilégiant la forme sur le fond, ça pourrait d'ailleurs ressembler au psychédélisme scorsésien des années 70 en moins réussi. On peut le regretter tant le cinéaste brésilien se complait à nous montrer les pires horreurs (le film est interdit aux moins de 16 ans) mais il a voulu traduire formellement le climat d'une favela sous haute tension. Il est vrai que l'on apprend très peu d'un point de vue social sur la vie de ses gens. En revanche Fernando Mireilles décrit ses personnages de manière assez humaine comme par exemple les premiers émois amoureux. De là vient sûrement la petite faiblesse du film. Le réalisateur cautionne la sympathie de ses personnages pour pouvoir ensuite mieux choquer le spectateur notamment lors d'une scène atroce où l'un des truands s'amuse à torturer un gamin de 11 ans en lui tirant dans la main. En tout cas difficile de rester insensible devant un tel film.
(Blop)