SIGNES
Les films de Shyamalan se suivent et se ressemblent. Leurs points communs ?
Les héros, à travers des rencontres et des événements
particuliers, vont être amenés à découvrir une vérité
sur eux-mêmes à un certain moment de leurs vies qu'ils n'auraient
jusque là jamais soupçonnée. Dans Sixième Sens,
un petit garçon confie à son docteur qu'il voit des gens qui sont
morts. Sous ce cas étrange se cache une effroyable vérité
que le médecin découvrira, à savoir qu'il est lui-même
mort. Dans Incassable, David Dunn, agent de sécurité de profession,
se trouve être le seul survivant d'une catastrophe ferroviaire. En rencontrant
un dénommé Elijah Price, atteint de la maladie de verre, ce dernier
lui délivre une théorie qui bouleversera son existence. Avec Signes,
Shyamalan réitère ce type de schéma. A 70 km de Philadelphie,
dans le Comté de Bucks, un homme, exploitant agricole, vit paisiblement
avec ses deux enfants et son frère cadet jusqu'au jour où il découvre
dans son champ de maïs d'immenses formes géométriques appelées
crop circles. Dans un premier temps il pense à une mauvaise plaisanterie
mais après avoir vu à la télévision ce genre de
phénomènes "fleurir" un peu partout dans le monde, il
envisage une deuxième hypothèse bien plus terrifiante : et si
ces formes étaient l'uvre d'une vie extraterrestre ?
Par son sujet, Signes se rapproche d'Independance Day mais la comparaison s'arrête
là. Shyamalan préférant (et à juste titre!) une
trame basée essentiellement sur le suspense à la manière
d'Hitchcock. D'ailleurs Signes rappelle étrangement un des films du maître
du suspense : Psychose. La maison où habite la famille ressemble particulièrement
à celle du film d'Hitchcock tandis que la musique composée par
James Newton Howard pour le film fait penser à celle composée
jadis par Bernard Hermann pour Psychose. En fait, pourrait-on dire, le film
de Shyamalan est construit ainsi, de petits clins d'ils, d'éléments
de réponses pouvant aider le spectateur à comprendre quelques
chose qui lui échappe. Quand le réalisateur filme les formes géométriques
du ciel ou encore quand on remarque sur la balançoire des motifs représentant
des étoiles, des lunes et autres astres, faut-il y voir un "signe"
? Le simple fait de poser la question semble nous donner des éléments
de réponse.
Mais au-delà de tout ça, la mise en scène de Shyamalan
reste efficace. On peut dire que le film se divise en deux parties. Dans la
première, le réalisateur pose une ambiance, quelques chose de
bizarre semble être en train de se préparer mais on ne sait pas
quoi. Les protagonistes sont obligés de faire l'effort d'entrer dans
le cadre et non l'inverse (la caméra allant rarement vers les personnages
ou alors très lentement de manière à montrer les prémices
d'un dérèglement notamment dans les scènes de dialogues).
Les scènes à la pharmacie et au bureau militaire révèle
des comportements étranges (mais surtout cocasses), le cadrage intrigue,
laisse paraître des zones d'ombres, les discussions ne mènent nul
part , le tout avec une mise en scène par intermittence qui fait propager
une certaine cacophonie entre les gens, fait que le temps se dilate et répond
à une certaine impondérabilité de l'instant présent.
Lentement le spectateur glisse vers la deuxième partie. Et ici, les mouvements
de caméra sont plus présents, justifiant le mystère que
laissait entrevoir la première partie. Certes, on pourra trouver la mise
en scène un peu plus classique mais le suspense reste intact, l'histoire
se décante, se rapproche de l'issue intensifiant les relations entre
les membres de la famille donnant lieu à des scènes larmoyantes
à souhait qui font tâche dans la facture globale de film. Une faute
de goût qu'on peut pardonner à Shyamalan tellement l'ensemble a
de la cohérence dans l'emboîtement des séquences.
La fin, avec son discours final explicatif, désormais marque de fabrique
des films de Shyamalan, trouvera toujours matière à débattre.
Le genre de questions (que je préfère taire pour préserver
le plaisir du spectateur) qui participent grandement de la réussite de
ce film, montrant aussi que Sixième Sens et Incassable n'étaient
pas des accidents. Et que Shyamalan est bel et bien un grand metteur en scène.
(Blop)